27/12/2013

7 instants là / Moments

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Gérard

Ne pas oublier la veste et les mains salies.
Se souvenir de ça. De la veste et des mains salies au moment où il rentrera dans la boîte de nuit. 
La fille au Polaroïd s'approche de l'acteur. Sympathique, populaire, très pro, il prend la pose.
"Merci Gérard, c'est fait!". Gérard s'éloigne vers sa loge.
C'est écrit. La séquence, c'est la 8. La veste et les mains sont salies.
Pour toujours dans les boîtes à mémoire.
Elle se souvient encore de l'énorme bouquet de fleurs qu'il lui offrira à la fin du tournage, en lui disant qu'elle le mérite vraiment. Le parfum des fleurs était intense et les paroles belles.
La fille au Polaroïd en est encore toute remuée.
C'est une femme.

"Saxo" de Ariel Zeitoun, Gérard Lanvin (Sam Friedman)


Emmanuelle

Christine saisit son appareil photo. Il lui faut l'actrice à cet instant de l'histoire.
"Emmanuelle!".
"Il est bien ton imper" dit la comédienne sans poser vraiment.
"Acheté à Anvers!".
Et Emmanuelle s'éloigne, mystérieuse et insaisissable. 
Tout en allumant sa cigarette, elle répète avec malice "Joli..." comme un écho éternel.

"Le temps de l'aventure" de Jérôme Bonnell, Emmanuelle Devos (Alix)


Hélène

Les costumes d'époque sont lourds. L'air est chaud.
"Où est Madame de Noailles?"
Faut-il qu'elle bondisse de son siège et poursuive la comédienne dans les jardins de Versailles?
Elle court donc après Hélène Vincent, un an après "C'est lundi, c'est ravioli!" du film "La vie est un long fleuve tranquille" d'Etienne Chatiliez.
"Juste une photo Hélène!".
Hélène s'immobilise "Je reste là, Non? C'est bien, je descends pas l'escalier?".
"Non, non, c'est super!" dit-elle essoufflée.

"Marie-Antoinette, reine d'un seul amour" de Caroline Huppert, Hélène Vincent (Mme de Noailles)


Yolande

Dix heures dans les jambes. La script supervisor rajuste son chignon qui s'écroule lamentablement. Elle se dit qu'elle aimerait bien trouver le temps d'aller aux toilettes, cherche du regard l'actrice. Est-elle déjà partie dans la loge costume?
"Elle est où Yolande?".
L'accessoiriste pointe son index.
Elle est là, sur le pas de la porte du décor, profitant d'un rayon de soleil. La tête baissée, comme dans ses idées, un peu cachée derrière la plante qui grimpe joliment au mur. La script supervisor ne se précipite pas, Yolande ne doit pas deviner sa présence. 
Si un électricien surgit derrière elle, il aura des câbles dans la main, voire un énorme projecteur, et puis il portera un tee-shirt "Je suis un électricien sexy" et tout sera gâché.
Mais non... Ce sera une belle photo. Cadeau des jours sombres.

"Séraphine" de Martin Provost, Yolande Moreau (Séraphine)


Anne

Le TER passe dans mon dos.
Il y a du bruit, un vent agaçant. J'ai mal à la gorge.
Je vois un badaud un peu louche regarder mon sac avec insistance. Je me souviens d'une maquilleuse dépouillée de sa mallette dans une gare parisienne.
Je récupère mon sac vite fait et prend mon appareil.
La comédienne est là entre deux plans, souriante devant une affiche publicitaire. Elle parle avec la réalisatrice. Elle a l'air d'avoir 20 ans, Anne. Elle est lumineuse. Je fais une photo en trompe-l'oeil, comme si tout se passait sur un balcon avec vue sur Paris.
Mais non, on est bien sur un quai.
Le TER passe dans mon dos.

"E-Love" de Anne Villacèque, Anne Consigny (Paule Zachmann)


Eric

"Christine! La revoilà avec son appareil! Arrête avec tes photos, encore des photos, toujours des photos, mais pourquoi des photos??? T'en a pas marre de faire des photos???"
Je ris. J'adore Eric. Sublime comédien, allergique aux oreillers remplis de plumes.
Il se trouve pas beau. Moi, je le trouve canon.
 
"J'attends quelqu'un" de Jérôme Bonnell, Eric Caravaca (Jean-Philippe)


Tuesday

Tuesday ... Does she only feel like living?
Elle semble si seule. Ailleurs.
Alors je la revois dans Le Kid de Cincinnati de Norman Jewison.
Avec sa beauté incroyable. 
A quoi pense Tuesday? Peut-être pense t-elle à Steve McQueen?
J'aime l'idée que nous pensons toutes les deux au King of Cool.
J'aime me faire des films.

"Something you have to live with" de John Berry, Tuesday Weld (Jessica)

Gérard
Jacket and hands are dirty. Don't forget it.
Remember that when he goes back in the nightclub.
The Polaroid girl walks to the actor. Popular, very professional, he poses for her.
"Thank you Gérard, it's done!". Gérard walks away to his dressing room.
It is written. Sequence is number 8. Jacket and hands are dirty.
Forever in the memory boxes.
She still remembers the huge bunch of flowers he offered her after shooting finished, saying she really deserves it. The scent of flowers was intense and nice were the words.
The Polaroid girl is still very moved.
She is a sensitive woman.

Emmanuelle
Christine grabs her camera. She needs the actress at that moment of the story.
"Emmanuelle!".
"I like your raincoat" says the actress.
"Bought in Antwerp."
And Emmanuelle walks away, mysterious and elusive.
While lighting up her cigarette, she repeats with a smile "Nice ..." as an eternal echo.

Hélène
The period costumes are heavy. The air is so hot.
"Where is Madame de Noailles?"
Should she jump out of her seat, and try to find the actress in the gardens of Versailles?
So she runs after Hélène Vincent, one year after "It's Monday, it's ravioli!" the Etienne Chatiliez's "Life is a Long Quiet River".
"I need to take a picture of you Hélène!".
Helen stops "I stand there, do I? Is it fine for you? Should I go down the stairs?"
"No, it's ok Hélène!" she says breathlessly.

Yolande
The script supervisor has been taking notes for more than ten hours now. Her hair held in a bun is collapsing miserably. She'd like to find time to go to the toilets, but looks around for the actress. Is she already gone in her dressing room?
"Where is Yolande?".
The props points his finger at her.
Here she is, on the doorstep of the set, enjoying sunshine. Head down, in her thoughts, a bit hidden behind the plant that climbs the wall nicely. The script supervisor does not hurry, Yolande should not guess her presence.
If an electrician comes up behind her, he will be holding cables, even a huge projector. He will be wearing a t-shirt "I am a sexy electrician", and everything will be ruined.
But no ... It'll be a beautiful picture. A gift in the middle of dark and gray days.

Anne
A train is running behind my back.
It's
noisy, the wind is irritating. I have a sore throat.
I see a bit dodgy bystander looking at my bag emphatically. I remember a friend stripped of its makeup briefcase in a Parisian train station.
I get my bag quickly and grabs my camera.
The actress is between two scenes, smiling in front of a advertising poster. She speaks with the director. She seems to be 20 years old, Anne. She is beautiful. I take a photo in trompe-l'oeil, as if everything was going on a balcony overlooking Paris.
But no, we are on a station platform.
A train is running behind my back.

Eric
Christine! Here she comes again with her camera! Stop with your pictures, will you? But why do you take so many photos?? Aren't you tired of taking pictures?? "
I laugh. I love Eric. Gorgeous actor, allergic to pillows filled with feathers.
He feels he is not handsome. Oh dear... I feel he really is.
 
Tuesday
Tuesday ... Does she only feel like living?
She seems so alone. So lost.
Then I remember her in Norman Jewison's The Cincinnati Kid.
With her incredible beauty.
What is Tuesday thinking about? Maybe she is remembering Steve McQueen?
I like the idea that both of us is thinking about the King of Cool.
I like to tell (sing?) stories to myself.

Tuesday Weld et Steve Mc Keen sur le tournage du "Cincinnati kid"